Je me demande combien de fois par jour un homme peut raidir sa machine et la faire cracher.
Avec Antoine, je sais que c'est au moins deux fois.
Nous l'avons fait aujourd'hui une première, à peine était-il arrivé pour la leçon.


Puis il est revenu dans ma chambre il y a un instant, alors que je venais d'y remonter pour me recoiffer.Lui, c'était pour m'emprunter des ciseaux dont sa mère avait besoin, paraît-il.
Eh bien, je pense qu'ill quillait déjà en frappant à la porte!En tout cas, pour la première fois, il a osé se débraguetter lui-même tout en me racontant son histoire de ciseaux, et me l'a sorti en disant:

-Voyez donc ce qui m'arrive, mademoiselle! Je suis encore tout prêt parce que je pensais à vous! Si vous vouliez bien, c'est si bon avec votre main!

Voyez l'audace! Pense-t-il par hasard qu'il lui suffira désormais de me la présenter pour que je le contente, comme une soeur de charité tapote la joue d'un malade en passant?
Je dis cela, mais sur le moment ça a été plus fort que moi; je n'ai pas pu me retenir d'avancer la main et de m'approcher de lui.
J'étais comme...ensorcelée, incapable de dire un mot, d'avoir autre chose dans l'esprit que cet irrésistible d'y toucher, de refermer ma main sur elle, de la sentir sursauter et se tendre...Seigneur, Jésus! Je me soucis d'Antoine comme une guigne, mais il a suffit qu'il sorte cela de son pantalon pour que je me conduise comme s'il était mon maître...Et pis encore...en commençant à faire aller et venir ma main, je me disais que ce serait mille fois meilleur de tenir celle de l'âne, puisque de toute façon ce n'est que cela qui m'intéresse dans un homme, autant un âne ou un cheval...

Je ne sais si je m'y prends mieux, ou s'il en a davantage le soir, toujours est-il qu'il a beaucoup juté dans ma main et sur mon lit. Il y en avait presque une flaque!

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Nous venons de passer en tête à tête Mathilde et moi, deux heurs délicieusement profitable. Entre femmes, puisqu'elle a l'indulgence de me considérer comme telle, et entre amies. Tranquilles: mes parents sont sortis pour la journée et les domestiques vaquent à leurs occupations.
Mathilde a décliné l'invitation pour cause de migraine, moi parce que je ne chômerai pas ici, ai-je dis.

Je lui ai dis combien je lui étais reconnaissante de s'être fait complice de mes découvertes, combien j'avais encore besoin d'elle. Elle m'a répondu qu'elle n'avait été que l'occasion de ces découvertes, que je les portais en moi...

 -"Tu es née pour le plaisir, ma chère, aussi évidemment que d'autres pour la musique ou la danse. Voici deux ans que je l'ai deviné et que j'attendais le moment de t'aider à te connaître.
Vois-tu, les femmes et les hommes qui portent en eux ce penchant fatal se reconnaissante et se découvrent très vite les uns les autres. Ils sont si peu nombreux...Oh, bien sûr, beaucoup d'hommes sont toujours plus ou moins en quête d'une aventure. Ils papillonnent autour de nous, je veux dire autour de celles qui leur paraissent accessibles, ils parlent beaucoup, ils se déclarent fou de nous dès le premier soir, et c'est vrai qu'ils ne demandent qu'une aventure.

Mais que nous leur offririons sur un plateau et qui serait bien décevante pour nous.

Pour les autres c'est autre chose.
Ils sont souvent plutôt lourds, peu causants, dissimulés, peu coquets.
Bref, tu ne les imaginerais jamais en conquérant, en irrésistible Don Juans.
Mais d'un coup, tu surprends un geste, un regard, un simple coup d'oeil brûlant, qui te déshabille et te va au fond du corps, et qui te laisse les jambes molles et à leur merci.
Et ce n'est pas différent de nous à eux, tu sais.
Ce n'est rien d'être belle, spirituelle, charmante...
Celles qui ont cela, mais qui n'ont que cela, ont des succès, des amants de vanité ou d'intérêt. Moi, ma puce, j'ai des hommes de plaisir, peu délicats, parfois pervers en amour, comme nous disons entre nous.
Ceux là ne te trahissent jamais, ne font jamais une imprudence, ne nous refont jamais l'amour de la même façon.
Chaque baisade (c'est ainsi qu'ils nomment l'amour, tu vois que cela n'a pas grand chose à faire avec les fades roucoulades des romans), chaque baisade avec eux est comme une première rencontre!
Et les premières rencontres ne traînent pas en longueur, de ces hommes-là à nous ni de nous à eux!"

Le fait est qu'avec Mathilde du moins, les choses sont allées vite.
C'était le soir de la fête de Papa, et nous avion bu un peu trop de champagne peut-être, elle en tous cas.
Elle est rentrée dans ma chambre alors que je venais juste de souffler ma bougie, en déshabillé noir, et un instant plus tard, à ca qui m'a semblé, elle était nue dans mon lit, me couvrant de baisers, me disant qu'elle avait envie depuis deux semaines de me tenir dans ses bras, bref, un ouragan de tendresse et de caresses, et de paroles de plus en plus obscènes qu'elle me chuchotait à l'oreille...

Tout à l'heure, elle m'a dit qu'il était vraiment facile à deviner qu' Emmeline et moi...que ma femme de chambre n'est pas assez prudente; que c'est son affaire de risquer d'être chassée, mais qu'elle devrait prendre garde à moi.
Elle ajoute encore qu'elle la soupçonne de se donner au premier venu pour quelques pièces. Je ne le sais que trop, au moins pour Duverger, car pour Mathéo, je ne crois pas qu'elle lui fasse payer ses faveurs!

Mathilde, qui me voit rougissante et rêveuse à l'entendre évoquer les débordements de ma femme de chambre, me tire les vers du nez, et me voici à lui raconter et l'aventure du vieux garage (qui ne lui paraît pas intéressante) et celle de Mathéo.
Là, elle est très aguichée et me fait répéter, mimer, figurer la longueur et le grosseur de "celle de Mathéo" en prenant des mesures sur mon bras.
Je devine à travers de petites phrases, qu'elle trouve inconvenant qu'Emmeline se réserve un tel prodige!

Après ce que j'ai entendu et entrevu, les idées que je me faisais des choses de la vie se tourneboulent  dans ma pauvre tête.
Est-ce pour moi chance ou malchance d'avoir été traînée de Line à Antoine, d'Antoine à Mathilde, et je le crains, de l'être un jour de Mathilde à Mathéo?
Suis-je vraiment un monstre? ou du moins une "exaltée", comme je l'ai entendu dire de madame de la T.-F, qui ne se contente pas d'aventures en quelque sorte banales avec les hommes de notre monde, mais à laquelle on prête un goût très vif pour les jeunes coursiers et épiciers, le tout avec l'assentiment de son mari! 

 

 

A suivre...........